Athénaïs de Béru

BOURGOGNE

Depuis ma rencontre avec Athénaïs de Béru en février 2018 lors d’un déjeuner réunissant une squadra de femmes épatantes, s’est construite une jolie amitié. Ma première gorgée de “Chablis Montserre”  remonte à cette même date. Je me souviens avoir été touchée par la précision et la délicatesse du breuvage mais aussi par l’humilité de la vigneronne. Ce jour-là, la Bourguignonne nous racontait comment elle en était arrivée, il y a une quinzaine d’années, à quitter son poste parisien dans la finance pour reprendre les rênes du domaine bourguignon, dans sa famille depuis cinq siècles. Une histoire familiale en pointillés entre le dernier millésime de son père en 1993 et la reprise des 15 hectares par Athénaïs. “Ma famille a toujours exploité des vignes. Cependant, le vignoble a connu des périodes de rupture. La première, du temps de mes grands-parents lorsque le phylloxéra a détruit tout le vignoble français.” C’est son père, au début des années 1980, qui replante les vignes parsemées sur les collines du village de Béru à quelques encablures de Chablis. “Par pudeur, mon père ne nous a jamais forcés, mon frère et moi, à reprendre le domaine. Il est arrivé dans le vin par passion, ses parents avaient essayé de l’en dissuader. Mon père souhaitait que l’on suive notre voie. Il nous a donné une culture du vin très tôt et très forte mais son métier de vigneron, il n’en parlait qu’à demi-mot.” Après une expérience de bénévole en Amérique Centrale au sein d’une association en charge de former des agriculteur.rice.s aux préceptes de l’agriculture biologique,

sensibilisée aux enjeux écologiques et convaincue des méfaits de la chimie sur la santé et l’environnement, Athénaïs convertit dès 2006 la totalité du vignoble en bio.“Cela n’a pas été facile, nous avons un climat compliqué, avec beaucoup d’humidité et une pression importante au mildiou. Il a fallu apprendre, comprendre.” Mais très vite, cette grande femme blonde aux billes bleues en guise d’yeux a l’impression d’être philosophiquement limitée par la bio. “On restait dans un système curatif à attendre qu’il y ait le feu pour l’éteindre.” Naturellement et parce qu’elle perçoit la dégustation de ces vins comme plus vibrante, Athénaïs s’attarde sur la biodynamie. “En agriculture, ce courant consiste à aller chercher une autre forme d’équilibre, à comprendre comment fonctionne la plante, quels sont ses points forts et ses points faibles. On quitte le système curatif pour basculer majoritairement dans un système préventif.” Cette logique d’accompagnement non violent prend tout son sens depuis quelques années. Comme lorsqu’en avril 2021 s’enchaînent plusieurs nuits de gel dévastatrices. “Ce qui est gelé est gelé, il n’y a pas de miracle mais il faut aider tout ce qui a été épargné à redémarrer en douceur.” En déambulant dans L’Orangerie, la plus petite parcelle du domaine mais également la plus chaude et la plus ensoleillée, Athénaïs nous explique, avec justesse et pédagogie, la logique des flux de sève et les afflictions que connaissent les vignes avec le réchauffement climatique. Entre deux explications, la vigneronne énumère le nom des plantes qu’elle utilise dans les vignes; achillée, camomille, osier…  autant de potions avec lesquelles accompagner le plus naturellement du monde son vignoble.

« Le chablisien est une zone sinistrée en ce qui concerne l’ouverture environnementale »

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